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'Now, it's the moment where the story can start again'. Le Suquet des artistes, Cannes, FR, 2019

Tape installation on walls and floor

Duo exhibition: 'Now is the moment where the story can start again' in Le Suquet des Artistes in Cannes with Joséphine Kaeppelin, curated by Bérangère Armand.

Tape drawing of a a large grid system in the art main room of the art space and a drawing on the courtyard of the Art Space. February 2019

Text by Bérangère Armand

Dans ce dédale de 900 mètres carrés, deux espaces s'imposent à notre regard. Le premier espace choisi est la cour extérieure, un vide qui accueille le visiteur en première instance, un palier entre deux mondes: le monde cosmopolite de la vieille ville d'une part et le monde intriguant de l'art d'autre part. Ce lieu interstitiel se dévoile d'en haut, puis on y déambule pour atteindre l'entrée du centre d'art. Cette cour est une contre-forme, le dessin en négatif d'immeubles rasés. Le plan de cette cour, dessiné par accident, porte en lui la mémoire poétique de la construction absente. Le second espace choisi est la grande salle intérieure qui s'apparente à une non-forme avec ses angles improbables et son étrangeté de souterrain.

Rapidement, il devient clair, qu'une oeuvre in situ, pourrait, le temps de l'exposition, reconfigurer ces espaces et leur donner une 'ligne claire' quoique éphémère. L'idée de 'ligne claire' [1] a été formulée por la première fois aux Pays-Bas, en 1977, pour décrire le style d'Hergé reconnaissable à son graphisme sobre, à ses traits d'épaisseur régulière et sa recherche de clarté.   

Grâce à une trame abstraite à la 'ligne claire' l'artiste néerlandaise Aam Solleveld se saisit de ces deux espaces aux contours étranges.

Elle y déploie des lignes multiples sur le sol et le bas des murs. Le damier immense transforme le visiteur en une sorte de personnage de fiction. Son regard est orienté vers la trame. Le regardeur se concentre sur ce plateau de jeu dont il devient un acteur, comme propulsé corps et âme dans le tableau. 

Virtuose du mélange de références a priori inconciliables, Solleveld formule un univers nouveau modelé à partir d'inspirations centripèdes. L'artiste flirte avec 'la grammaire de l'ornementation' [2]. A sa manière, elle  renoue avec la tradition ornementale mauresque dessinant des motifs avec les matériaux de notre temps: bandes adhésives et lumières ' led'. Dans le même temps, son oeuvre, le damier, la modularité, le lien entre intérieur et extérieur, l'usage de la ligne noire (etc). mais, chez Solleveld, pas de dogmes, l'artiste compose, imagine, invente, modèle librement, se saisissant de l'architecture comme d'une matière première.

Solleveld choisit des éléments déjà connus, comme par example le motif de la trame, pour imaginer une forme nouvelle, inconnue qui n'a pas d'équivalent dans la réalité. Se  faisant, elle nous invite à la fiction. La fiction n'est pas quelque chose d'absolument distinct de la réalité: au contraire, la fiction s'ancre dans la réalité.

Joséphine Kaeppelin, quant à elle, se promène dans l'espace public ou se rend dans les entreprises pour y faire des' audits'. Aux prises avec le réel, l'artiste converse, écoute, observe et glane des phrases dans des situations sociales connues. Ces fragments sont sortis de leur contexte, pour être offerts, ailleurs et autrement. Là encore, le travail de l'artiste consiste `a manipuler des éléments du réel pour en proposer une forme inédite, nouvelle, empreinte de fiction.

Le décor est planté, les personnages sont désignés. L'histoire des lieux peut donc commencer à nouveau:

Now, it's the moment where the story can start again [3]

[1] En 1977, Joost Swarte, Har Brok et Ernst Pommerel organisent à Rotterdam une exposition en l'honneur d'Hergé. Parmi les quatre livrets qui accompagnent la présentation, l'un deux se nomme: De klare lijn (La ligne claire).

[2] The grammer of ornament, Owen Jones, 1856, Day & Son, Lincoln's Inn Fields, London, Edition 2016, Ivy Press Limited, 495 pages.

[3] Le titre de l'exposition est emprunté à l'artiste Joséphine Kaeppelin. Cette phrase apparait dans sa série des'Billboards posters': Il faut qu'il se passe quelque chose. (2014) 

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